Plusieurs quotidiens nous rapportent que le village le plus propre d’Asie est un village situé dans le Nord de l’Inde. Mawlynnong n’était encore accessible qu’à pieds, il y a quelques années. Les règles y sont simples, chacun est responsable de la propreté du village et doit ramasser toute ordure trouvée sur son chemin. Des paniers de bambous sont accrochés aux arbres à chaque coin de rue et s’intègrent parfaitement dans le décor. Le plastique est prohibé au sein de la communauté et celui qui amène du plastique dans le village doit repartir avec. Nul ne saurait enfreindre ces lois, lorsque dès l’âge de 3 ans, les enfants apprennent à prendre soin de leur environnement à l’aide de gestes simples, qui pourtant nous échappent totalement en Occident.

Les limites de notre logique individualiste occidentale

Dans notre conception des choses, nous nous octroyons le droit de commettre des impairs en matière de propreté environnementale car nous déléguons son entretien à des personnes dont c’est la mission. Il nous apparaît alors comme presque légitime d’impacter de manière négative notre environnement quotidien (les rues, les parcs communaux, les plages et les stations de montagnes, notre environnement dans sa globalité), car nous le percevons comme extérieur à nous, différencié, et sous la responsabilité de quelqu’un rémunéré pour l’entretenir. De la même manière, nous délaissons ou ignorons (la plupart du temps) les moins chanceux d’entre-nous et nous ne prenons pas soin d’eux. Nous pouvons donner une pièce de monnaie à un infortuné, mais nous ne le regardons pas vraiment, nous ne le considérons pas comme un membre de notre grand village. Mais si l’on observe ce comportement sous un autre angle, d’une manière plus subtile, nous comprendrons alors qu’il n’y a pas de différence, dans l’Absolu, entre notre environnement extérieur et notre environnement intérieur. Le comportement que nous adoptons quant à l’entretien de ce qui nous entoure ne semble pas si éloigné de la logique qui nous pousse à imposer à notre environnement intérieur, notre corps et notre esprit, des éléments dont l’impact est négatif. Une grande partie de la population ingère à longueur de temps des aliments de mauvaise qualité, empreints d’énergies lourdes et de substances artificielles inassimilables par le corps. Par ailleurs, au même titre que le corps physique est nourri d’aliments malsains, notre esprit est nourri par toutes sortes de négativités à travers nos occupations quotidiennes et les distractions en vogue dans nos sociétés occidentales (images violents, bruits agressifs, mots violents, ignorance etc). Nous ne prenons pas le temps de regarder notre intérieur, ses parties les moins chanceuses, celles qui doivent être d’autant plus soutenues. Nous comprendrons ainsi que nous délaissons l’entretien de notre environnement intérieur dont nous reléguons la responsabilité à un tiers, le jour où nous rencontrons un problème. Fort heureusement, une partie de la population s’ouvre à une autre approche de la santé et nous tendons à aller vers une prise en charge de notre propre santé physique, émotionnelle et subtile, dans une logique préventive. Cependant le constat reste tout de même présent, notre logique d’individualisation nous pousse à nous préoccuper de nos distractions et de nos considérations égotiques, au détriment de ce qui constitue notre grand village. Pourtant, prendre soin de notre environnement extérieur représente des actions hautement symboliques et dont la portée subtile amène à une compréhension altruiste du « vivre-ensemble ». De la même manière que nous lavons notre linge, que nous nettoyons notre lieu de vie, que nous prenons soin de nos proches, participer à l’entretien de notre environnement extérieur est riche d’apprentissage.

Que retenir de cette pratique exemplaire perpétrée à Mawlynnong ?

Ce village peut être compris comme un éco-système très équilibré et en harmonie avec la Nature. Chacun s’occupe de l’éco-système dans lequel toute la communauté vit. Il n’est pas question de déléguer l’entretien de leur environnement de vie à une tierce personne. Et pour cause, sur un plan plus subtil, le fait d’entretenir son environnement proche et de le garder sain, propre et beau, a un effet positif sur l’ensemble de la communauté qui participe à cette préservation. L’équilibre et l’harmonie nourris par les habitants de ce village sont vecteurs d’énergies positives pour les personnes qui y vivent et grandissent. Outre les nombreux bienfaits subtils qui découlent d’une telle pratique communautaire, participer à l’entretien de son village revient à prendre soin des autres habitants. Le premier qui passe sur un chemin et ramasse une ordure, prend soin de toutes les personnes qui emprunterons le même chemin après lui. Ces petites actions représentent le socle d’une logique de « vivre-ensemble » totalement opposée à la notre. Il s’agit de prendre soin des autres, de la même manière qu’ils prennent soin de vous, sans en tirer quelconque gloire, dans la plus grande simplicité d’être. Un changement structurel et comportemental au sein des sociétés occidentales mettra des dizaines d’années à se manifester. Néanmoins, si chacun de nous commence à prendre soin des autres par des petites actions anonymes d’entretien de notre grand village, alors nous parviendrons à modifier certaines de nos croyances collectives limitatives et individualistes. Nous comprendrons alors que prendre soin des autres, revient à prendre soin de nous même. Retenons ce bel exemple et commençons à agir avec altruisme, dès que l’occasion nous en est donné, en pensant à celui ou celle qui passera derrière nous sur le Chemin.