Sortir de la conception physico-centrée du yoga

Publié le : 10 juin 202013 mins de lecture

A la découverte de l’art de vivre du Raja Yoga

Lorsque l’on parle de yoga, beaucoup comprennent qu’il s’agit d’une pratique d’étirements, à mi-chemin entre le stretching et la relaxation. Et pour cause, le yoga et ses produits dérivés (photographies acrobatiques, mode, tourisme etc) véhiculent cette image très marketing de cette art de vivre, qui ne se résume pas à des performances de souplesse. Le yoga est plus profond que cette représentation très orienté culture du corps physique, que l’on veut bien lui prêter. Il va de soi qu’un corps physique sain, étiré, assoupli, musclé et tonique est une monture qui nous mènera bien plus loin qu’un corps épuisé et usé par les excès.

Maharishi Patanjali a inventé les huit branches du yoga. On les appelle les asthanga du yoga. Ces huit branches ne représentent pas un parcours initiatique où l’on franchi les étapes les unes après les autres mais au contraire, un ensemble de points d’accès à un sens élargi du moi (Deepak Chopra). Ce sont les éléments du Raja Yoga, le chemin royal vers l’union.

La première branche du yoga : le Yama

Cette branche enseigne les lignes de conduite universelles qui nous permettent d’évoluer en société, en nouant relation avec nos semblables. Elles invitent à respecter ces quelques principes : pratiquer la non-violence, s’exprimer en toute sincérité, contrôler leur sexualité, être honnêtes et généreux.

Suivre un ensemble de règles strictes et rigoureuses, telles qu’édictées dans un grand nombre de cultures religieuses, semble aux yeux de Patanjali, amener un surcroit de contraintes difficiles à tenir. Il voit dans les yamas, la possibilité pour un être éclairé, de modifier son comportement de façon spontanée et progressive.

Si nous considérons que nous sommes constitués de la même étoffe que l’ensemble de l’univers alors nous ne voudrons pas nuire à autrui. Nul ne saurait adopter un comportement injuste à l’égard d’une personne ou d’un être vivant qu’il considère comme son égal. D’une manière instinctive, vous appliquez alors un comportement social juste. Lorsque l’on atteint cet état de justesse, le Kriyā shakti, on se comporte en accord avec la loi naturelle. En agissant depuis ce niveau, on évite les résistances et les conséquences personnelles sont nulles. C’est la partie de vous la plus élevée qui se manifeste à travers votre comportement, et cette partie ne connaît pas la violence ou la haine.

Le second yama qui conseille de s’exprimer en toute sincérité (satya), apprend à différencier vos observations de vos interprétations. Atteindre cette vérité implique des choix de vie en harmonie avec une vision élargie du soi. Pataňjali décrit la vérité comme l’intégrité de la pensée, de la parole et de l’action.

Le troisième Yama, autrement traduit par Brahmacharya, signifie pour la majorité des êtres humains qui choisissent la connaissance du soi, l’épanouissement saine de l’énergie sexuelle.

Le quatrième Yama (asteya), ou honnêteté, fait référence à cet état d’être dans lequel la complétude intérieure domine, ne laissant pas de place à la peur de manquer, de perdre. Ainsi, le besoin de manipuler ou tromper autrui pour assurer sa sécurité matérielle, financière, affective, disparaît pour laisser place à l’honnêteté.

Le cinquième Yama se réfère à la générosité (aparigraha), lorsque la focalisation sur l’égo diminue pour se tourner vers l’esprit dont la nature est non locale. Ainsi, le yogi exprime la générosité dans l’ensemble de ses pensées, de ses paroles et de ses actes.

La deuxième branche du yoga : le Niyama

Selon Pataňjali, il s’agit des règles de comportement personnel d’une personne en évolution. Elles encouragent la pureté, la satisfaction, la discipline, l’exploration spirituelle et l’abandon au divin.

La pureté (shoucha) telle que comprise ici ne fait pas référence à des principes de vertus mais davantage au choix conscient de vivre des expériences nourrissantes et non toxiques pour notre corps et notre esprit. De telles expériences constituent d’immenses quantités d’informations que vous métabolisez au même titre que l’alimentation.

La satisfaction (santosha), est la forme de contentement qui apparaît lorsque vous renoncez à votre besoin de contrôle, de domination et d’approbation.

La discipline est comprise comme le fait d’adopter une hygiène de vie en accord avec le rythme de la nature. Il comprend le choix de nourriture saine et équilibrée, un sommeil réparateur en se couchant tôt, la pratique de la méditation chaque jour. La discipline est traduite par tapas qui signifie littéralement le feu. Il est alors le feu transformation qui mène à une conscience supérieur.

L’exploration spirituelle (svadhyāna) se traduit par l’étude de la littérature spirituelle mais comporte cette dimension de regard intérieur qui permet la connaissance de soi indépendamment de tout élément extérieur.

L’abandon au divin, Ishwara-Pranidhana, conduit à s’abandonner à la sagesse de l’incertitude.

La troisième branche du yoga : Asana

Asana signifie « siège » et c’est à cette unique branche du yoga que l’on pense généralement. Il s’agit de l’ensemble des postures qui ont vocation à accroître la souplesse et la tonicité du corps physique. Lorsque les postures sont pratiquées avec conscience, les āsanas permettent l’intégration du corps/esprit.

Les bienfaits de la pratique des āsanas sur le corps physique et l’esprit sont nombreux. Cela permet de développer la souplesse, la force, l’équilibre et l’ancrage. La pratique calme le mental et accroît la concentration. Les bienfaits de la pratique des postures ne sont plus à prouver. Mais parmi les vertus, cette pratique permet d’évacuer l’accumulation de toxiques et de libérer les canaux de circulation des énergies.

Le développement de la souplesse n’est pas seulement physique mais rejoint la souplesse émotionnelle, affective, psychique. Plus la souplesse s’installe en nous, plus nous sommes en mesure d’accepter, de lâcher-prise et de s’abandonner à l’incertitude.

La quatrième branche du yoga : le Prānāyama

Le prāna peut être traduit par « force vitale » et constitue l’énergie essentielle qui anime la matière inerte et lui donne vie (Deepak Chopra). La libre circulation de cette énergie vitale dans l’ensemble du corps est garante d’une bonne santé. En revanche, lorsque cette circulation est bloquée, la fatigue et la maladie surviennent. Cette notion de force vitale est reprise dans l’ensemble des traditions spirituelles qui s’ouvrent à la guérison, comme par exemple le chi (ou Qi) dans la médecine traditionnelle chinoise.

Le prānāyama est la maitrise de la force vitale. La respiration consciente conduit à la maîtrise de cette force et offre un outil efficace pour améliorer l’intégration neuro-respiratoire.

Le prāna est une énergie qui coule à travers la nature et l’univers. Avoir conscience de la circulation de cette énergie en nous, est un moyen de relier notre individualité à l’univers.

La cinquième branche du yoga : le Pratyāhāra

Ce terme signifie littéralement « éloigné de la nourriture ». Il s’agit ici de nourriture sensorielle métabolisée par nos sens (ouïe, vue, odorat, goût et toucher). S’émanciper de cette nourriture nous permet de nous tourner vers notre perception subtile des sens, appelée tanmātras. Cela permet de découvrir que le monde des formes et des phénomènes n’est qu’une projection de notre conscience.

Cela signifie que lorsque vous voyez un élément extérieur, comme une fleur, la métabolisation de cette image par la réception de fréquences électromagnétiques qui déclenchent des réactions chimiques dans vos cellules conduisant jusqu’au cortex visuel à l’arrière du cerveau, trouvera son assimilation ultime dans votre conscience. Ainsi, la fleur que vous avez vu s’affiche sur l’écran de votre conscience.

Cette pratique a permis aux yogis de nous transmettre «Je ne suis pas dans le monde, c’est le monde qui est en moi ».

Ainsi, s’éloigner durant une période donnée de l’agitation du monde, du bruit, de la violence de certains mots, de la télévision et de toute autre stimulation, nous permet de découvrir ces sens subtils en nous. Et cela à l’effet d’un jeûne, lorsque nous remangeons après une période de diète, la nourriture nous semble plus savoureuse que jamais.

La méditation permet de hisser la conscience jusqu’à ces zones intérieures plus paisibles.

La sixième branche du yoga : le Dhāranā

Cette branche se réfère à la maitrise de l’intention et de la concentration sur l’intention. Tout ce sur quoi votre attention se porte, ce sur quoi vous vous concentrez prend de l’ampleur dans votre existence. En apprenant à valoriser votre attention, vous serez en mesure de construire votre réussite.

Mais pour cela, il faut être en mesure de clarifier les intentions qui sous-tendent tous vos choix. En clarifiant l’impulsion de départ, vous entamez déjà la réalisation de votre choix.

Selon le yoga, vos intentions ont un pouvoir infini et une fois que vous vous concentrez sur votre choix ou votre objectif, vous activez une puissante influence sur sa concrétisation. Ainsi, avant de focaliser votre énergie et votre concentration sur quelque chose, il est très utile d’en avoir clarifié l’intention et ne pas s’en éloigné jusqu’à sa réalisation.

Nous pouvons alors définir nos intentions avant la méditation, puis les abandonner à l’univers.

La septième branche du yoga : le Dhyāna

La méditation offre le moyen le plus direct vers le développement du témoin intérieur. Le monde est en changement perpétuel, tout comme les expériences que nous vivons, et la pratique de la méditation nous permet de ne pas perdre notre moi dans le balai incessant de l’impermanence.

Ce témoin intérieur en vous, est cette dimension immuable, qui observe sans jugement l’expérience que vous faites de la vie. C’est l’âme. La pratique de la méditation permet de trouver le chemin qui nous mène à ce témoin intérieur. Cet état de conscience en lien avec le témoin intérieur, apprend à observer les sentiments, les sensations extérieures sans y réagir. Au contraire, se référer à cet état de conscience permet d’observer l’impermanence avec recul et accroît le discernement.

Cette capacité à rejoindre son témoin intérieur doit être développée avec la pratique et s’améliore au fur et à mesure.

La huitième branche du yoga : le Samādhi

Deepak Chopra nous explique que le samādhi est cet état qui repose sur une conscience pure et illimité. Au-delà de l’espace et du temps, du passé et du futur, au-delà de l’individualité, le samādhi donne un aperçu du champ de l’éternité et de l’infini.

Dans cette disposition de l’être, la peur et l’angoisse ne font jamais surface. La vie n’est plus prise avec tant de sérieux car nous intégrons que la vie n’est autre qu’une grande pièce de théâtre cosmique, dans laquelle nous jouons notre rôle.

Tel est le but du yoga, se connaître comme un être spirituel, portant le déguisement d’un être humain qui s’enracine dans l’union et agit en harmonie avec le flux de l’évolution. (D. Chopra)

Cet ensemble de branches constitue la pratique du yoga, qui ne saurait être restreinte à l’unique performance physique des āsanas. Le yoga représente la voie royale (raya yoga) vers l’Union et représente un art de vivre complet, qui touche toutes les dimensions de l’être.

 

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